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10 questions à Gabriel Osson

Crédit Photo: Christine Bérubé

Introduction

D’origine haïtienne, Gabriel Osson est très impliqué dans la francophonie torontoise. Il est président de l’Association des auteures et auteurs de l’Ontario Français (AAOF) et consacre son temps à la Coopérative radiophonique de Toronto à titre d’administrateur. Gabriel anime aussi l’émission hebdomadaire Franco Découvertes à la radio francophone de Toronto, CHOQ FM.

Portant la culture haïtienne dans son cœur, il nous a parlé de l’importance de l’écriture et de la nécessité de connaître l’histoire de son pays et de son peuple. Il se met au service des enfants haïtiens en présidant l’Association Haïti Futur-Canada qui vise à installer des tableaux numériques interactifs, munis de panneaux solaires dans des écoles rurales d’Haïti.

Sur la création et la lecture

1. Qu’est-ce qui déclenche votre écriture? Est-ce un événement, une émotion, un souvenir ou un projet bien déterminé?

Les trois séparément et simultanément parfois.


2. Quels sont les auteurs qui vous ont marqué?

Il y en a tellement, Hugo, Lamartine, Prévert, Jacques S. Alexis, Césaire, P. Coelho.


3. Quels auteurs francophones conseillez-vous à nos lecteurs de la Bibliothèque des Amériques?

Tous, mais allez à la découverte des auteurs franco-ontariens, une littérature riche et diversifiée. Vous trouverez les œuvres classiques et contemporaines de l’Ontario français dans le catalogue numérique de la Bibliothèque des Amériques.

Sur l’écriture

4. En 2017, vous publiez un premier roman Hubert le restavèk (Éditions David), qui raconte la vie de ces enfants haïtiens qui sont exploités, forcés de « rester avec » des gens qui les contraignent à travailler dans des conditions insupportables. En racontant cette histoire avez-vous essayé de réparer cette injustice sociale?

Mon premier but : Je voulais surtout faire connaître le sort de ces enfants invisibles et sans voix. Conscientiser le monde entier au sort de ces enfants abandonnés à eux-mêmes sans défense et sans personne pour défendre leur cause. On leur vole littéralement leur enfance et la société haïtienne qui perpétue ce phénomène reste muette et aveugle devant leurs problèmes.

Mon second : remettre toutes mes redevances d’auteur provenant de la vente de ce livre à un organisme d’aide aux restavèks afin d’aider ces enfants.


5. En janvier 2020, votre deuxième roman Le jour se lèvera attire l’attention du grand public au Canada. Quelle est sa genèse?

En 1964, 13 jeunes du mouvement Jeune Haïti quittent Miami pour tenter de renverser le régime de François Duvalier. Lors de la commémoration du 50e anniversaire de l’exécution de deux d’entre-eux sur la place publique, je me suis rappelé de ma présence en ces lieux et c’est en remontant le cours de l’histoire que m’est venu l’idée du roman.


6. En rédigeant Le jour se lèvera qu’avez-vous appris par ce travail à la fois historique et à la fois empirique ?

Je me suis rendu compte que l’histoire de ces jeunes et de Jeune Haïti était mal connue ou peu connue. Il n’est pas fait mention dans aucun manuel scolaire récent et la génération actuelle n’a pas entendu parler d’eux ni de leurs faits d’armes. J’ai appris chemin faisant qu’il faut réhabiliter l’histoire avec un grand et un petit « h ». J’ai adoré, grâce à la liberté du roman de pouvoir laisser libre cours à mon imagination et de donner une vie différente à ces jeunes héros venu mourir pour un idéal de liberté, surtout leur parcours dans le maquis dans les montagnes haïtiennes.


7. Vous avez choisi les chemins de la littérature pour parler de votre pays natal Haïti et évoquer son histoire complexe. Qu’en attendez-vous?

J’ai quitté Haïti assez jeune et un grand pan de son histoire, ancienne et récente, m’avait échappée. Après le séisme de 2010, j’ai cru bon de me retremper dans son histoire autant qu’écrite que réelle en y retournant chaque année comme volontaire pour aider à former des enseignants au sein d’un petit groupe. L’écriture me permet de faire sortir Haïti du folklore et de présenter sa beauté tant à travers mes romans que dans ma poésie. La littérature récente d’Haïti est riche et variée, tant par ses auteurs qui vient dans le pays que par ceux qui résident à l’étranger. J’essaie par mes écrits de lever un pan du voile de cette complexité. La littérature c’est comme peler un oignon, chaque couche en révèle une autre plus belle, plus riche en saveur. Il faut de la patience et de la persévérance pour en découvrir le cœur.

Sur l’identité et la francophonie

8. Que vous inspire le mot francophonie?

Un son, une toile, une diversité de peuples et de genres liée par un fil commun la langue française.


9. D'origine haïtienne, vous demeurez à Toronto depuis plusieurs années, qu'est-ce qui vous enchante dans la culture francophone du Canada?

Sa diversité, sa résistance et sa force à traverser le temps et à s’enrichir au passage de mots, d’expressions qui lui est propre tout en gardant vivante la langue et la culture francophone.


10. Quelles sont les traditions ou les valeurs de la culture créole qui vous tiennent à cœur?

La culture créole est à mon avis le plus beau métissage qui s’est créé au contact d’autres cultures et d’autres langues. Ses traditions, danses, chansons sont enracinées dans divers continents et teintées de couleurs locales et pourtant elles restent liées pour former ce tissu multicolore à travers ses peuples, leur histoire, leur parcours aussi divers que riche. Ce qui m’étonne le plus c’est la langue créole qui, bien qu’ayant pris naissance dans diverses contrées, reste intelligible par tous les parlants créole malgré leurs particularités régionales. De la Louisiane aux Seychelles, elle a su résister aux assauts du temps et des autres langues. Elle est forte et porteuse. Elle est rebelle et colorée. Ce sont ces valeurs qui m’attirent et m’excitent.

Biographie de Gabriel Osson

Gabriel Osson est poète, romancier et artiste-peintre. Né à Port-au-Prince (Haïti), il vit à Toronto. Il est retraité du ministère de l’Éducation de l’Ontario où il a œuvré pendant dix ans. Auparavant, il a été gestionnaire au Collège Boréal à Toronto précédé d’une longue carrière en entreprise privée en plus d’avoir été consultant en développement organisationnel.

Il se consacre à plein temps à l’écriture. Il donne des conférences et anime des ateliers d’écriture pour différents publics, que ce soient des retraités ou des jeunes du secondaire dans les écoles de langue française en Ontario lors de la tournée Mordus des mots.

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